Une situation kafkaïenne pour les victimes usurpées


José témoigne dans « L’Enfer des vols d’identité ».

FRANCE 2 – JEUDI 26 OCTOBRE À 21 H 10 – DOCUMENTAIRE

L’usurpation d’identité est une escroquerie en hausse constante avec l’essor des démarches en ligne. Quelque 300 000 personnes en seraient victimes chaque année. Elles sont confrontées à un casse-tête kafkaïen : prouver qu’elles sont bien… elles-mêmes. Un vrai parcours du combattant sur lequel s’est penchée l’émission « Envoyé spécial ». Avec des témoignages ahurissants.

Depuis qu’un escroc lui a subtilisé ses papiers d’identité dans un train en 1999, José n’a jamais pu se marier ni reconnaître ses enfants à leur naissance : l’escroc l’avait déjà fait à sa place ! « Un cauchemar qui m’a volé la moitié de ma vie », assure-t-il. Le fait que l’individu ait été mis en prison pour viols en 2009 n’a rien changé : il a fini par porter plainte en 2014, du fond de sa cellule, pour… usurpation d’identité, se présentant comme la victime. Contre toute attente, le personnage obtient une carte d’identité et une carte Vitale, avec lesquelles il recommence, dès sa sortie de prison, à usurper l’identité de José.

Léane, 20 ans, se voit réclamer par la SNCF des dizaines de billets de train impayés sur des trajets qu’elle n’a jamais pris… Elle découvre que, depuis 2021, quelqu’un d’autre voyage sous son nom sans titre de transport, présentant aux contrôleurs une fausse carte d’identité. A la clé, 6 000 euros d’amendes ! C’est son père qui finira par la tirer d’affaire – momentanément –, en ne lâchant pas la SNCF, elle-même dans « une impasse à cause de la protection des données RGPD et du cloisonnement des services administratifs », dit-il.

Nouvelle forme de criminalité

Sébastien, un informaticien de Nemours (Seine-et-Marne), doit « près de 100 000 euros à différents organismes pour des crédits [qu’il n’a] jamais contractés » : quelqu’un a ouvert à son nom un compte bancaire dans le Morbihan, où il dit n’avoir « jamais mis les pieds ». Il a décidé de faire appel au juriste Fily Kante, dont le frère a été confronté à cette nouvelle forme de criminalité, et qui a créé une start-up, ID Protect, pour « accompagner les victimes dans leurs démarches » (moyennant un abonnement de 79 euros à 489 euros).

Dans son documentaire haletant, digne d’un film d’Hitchcock ou d’Un jour sans fin (Harold Ramis, 1993), Corinne Langlois n’a réussi à filmer aucun de ces usurpateurs. Celui de José, qui s’affiche sans complexe sur les réseaux sociaux, photos de lui à l’appui, n’a pas voulu ouvrir sa porte aux journalistes, estimant que « c’est une affaire réglée ».

La victime – la vraie – a pris une avocate et mené elle-même « l’enquête de voisinage que la police n’a pas su faire », à Ris-Orangis (Essonne), sa ville natale. « Mes frères et sœurs y vivent toujours, mais personne n’est venu les interroger », affirme José, qui va intenter une action contre l’Etat. En attendant, en guise d’exutoire, il écrit le roman de cette vie volée. Le titre : L’Ombre de quelqu’un d’autre.

L’Enfer des vols d’identité, documentaire de Corinne Langlois (Fr., 2023, 70 min).



Source
Catégorie article Politique

Ajouter un commentaire

Commentaires

Aucun commentaire n'a été posté pour l'instant.